-Justement, avant de parler d’avenir, dis-nous d’abord d’où tu viens, Kenya ?

-Je suis une américaine avec un passeport britannique. Née aux Etats-Unis, puis étudiante à Londres. J’ai toujours fabriqué des objets, beaucoup d’objets. Je passais mon temps avec un marteau, un pieu, à sculpter des choses abstraites, des vases, des bijoux… c’était très physique, j’avais des bras de tennisman ! Puis j’ai intégré St Martins School of Art, ça été une expérience formidable car ils m’ont donné la possibilité de faire vraiment ce que je voulais.

 

-Et la mode dans tout ça ?

-La mode a toujours entouré ma vie… et mes études. Je me souviens avoir fabriqué des bijoux en métal et ballons de baudruche pour un projet ! On me regardait bizarrement…

 

-Oui, difficile d’imaginer le truc…

-C’était des bracelets. Ça ondulait.

 

Ni une ni deux, elle commence à me faire un croquis des bracelets en question. Le serveur s’approche, on commande deux verres de vin blanc. On se plaint un peu de la chaleur avant de trinquer et de reparler chiffon.

-En 2009, j’ai ouvert une boutique de lingerie à Londres : « Apartment C ».

-Super nom !

-Merci… je fais attention aux noms. Le succès d’Apartment C a été immédiat. On a été nommé l’une des cinq meilleures boutiques de Londres, juste derrière Anthropologie… Vogue nous a même élu « Britain’s best boutique ».

-Ah oui ! Pas mal !

-L’expérience fut extraordinaire… mais courte car en 2012 j’ai déménagé à Dakar, au Sénégal. C’est là que m’est venue l’idée de Cabana Disco.

 

-Encore un super nom…

-Oui, le nom et toute la collection s’inspirent du bord de mer. Un mode de vie relax, libre, un peu rétro. Une certaine idée de l’Afrique aussi, une Afrique des sixties… pas historiquement exacte, plutôt comme on se l’imagine. C’est du ressenti. Tu sais, cette impression que laisse les souvenirs.

 

-Un petit côté photo sépia et film de vacances en 8 millimètres ?

-Oui… mais tout en restant moderne ! La nostalgie du passé avec un œil vers l’avenir ! On pourrait appeler ça du « Africa retro futurism », tu ne crois pas ? Un zeste de rétro avec un nuage de modernité ! Bon, je parle trop.

 

-Mais non ! Au contraire c’est génial d’être aussi passionnée. Et ta collection est superbe. Tu peux nous en dire un mot ?

-C’est une ligne de chaussures, sacs, tote bags et accessoires pour les cheveux, des headbands notamment. Tout est fabriqué au Sénégal. Il y a un zeste d’Afrique dans chaque création.

 

-C’est fait pour qui ?

-Pour ceux qui apprécient la qualité mais ne veulent pas non plus dépenser des sommes folles. Des gens indépendants, qui aiment la mode de toute leur âme. Qui vivent pour elle ! Je ne sais pas… peut-être une mentalité innocente… les gens qui aiment les vieilles histoires…

 

-Toujours cette nostalgie, hein ?

- Oui… mais tournée vers l’avenir. Tu sais, je fais beaucoup de recherches. J’aime regarder les choses, qu’elles soient belles, sombres ou étranges… et les mélanger et voir ce que ça donne ! Réinventer les choses, leur donner un second souffle.

Là, elle me sort un carnet sur lequel elle note ses coups de cœur, ses recherches et griffonne tout ce qui lui passe par la tête. Sur la première page, une liste « des gens que j’admire et des trucs que j’aime bien ». David Bowie, Grace Jones, Day of the Dead…

-Ce qui compte le plus, c’est que les gens se sentent beaux dans mes créations. Je voudrais que ce soit des pièces qu’ils conservent précieusement. Pas du jetable. C’est pour ça que j’aime tellement le vintage : pour cet attachement, ce lien fort.

 

-Comment peut-on se procurer tes créations ?

-Pour l’instant je ne distribue pas en Europe. Je me concentre sur l’Afrique, les Etats-Unis… et Londres. Mais pour les lecteurs de Fashion Pixies, je vais faire un effort ! Le plus simple est de me contacter directement via la page Facebook de Cabana Disco. Toutes les pièces sont entre 10 et 90 euros.

 

-Je ne sais pas si tu jouais à ça aux Etats-Unis, mais en France, quand j’étais petite, on jouait à un jeu qui s’appelle le portrait chinois.

-C’est un peu raciste, ce nom ! Je plaisante.

 

-Haha. En fait tu n’as peut-être pas tort… bref, c’est un jeu de devinettes qui fonctionne par analogies.

-Ah oui je connais ! Tu veux faire le portrait chinois de Cabana Disco ?

 

-Exactement ! Si c’était une égérie ?

-Frida Khalo… et Grace Jones mais bon, c’est difficile de baser une collection sur elle parce que personne ne peut aussi bien porter les choses qu’elle.

 

-Une musique ?

-Des mariachi avec un chœur Funk des années 70 ! Et le chœur doit danser, c’est important qu’il danse. Note-le !

 

-Un moment de la journée ?

-Le coucher du soleil… entre amis. Tequila et Tacos !

 

-Un parfum ?

-Une crème solaire qui sente très bon…  le parfum du jasmin, du soleil et d’un feu de bois sur la plage.

 

-Et un pays ?

-Cabana Disco serait sa propre île, bordel. Avec de la musique tout autour.